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Les voyages littéraires de Sabelie

27 mars 2013

Peste et choléra

« Peste et Choléra »

de Patrick Deville, aux éditions du Seuil, août 2012

 

L'auteur rend hommage aux scientifiques qui au XIXe siècle et début Xxe menèrent une lutte acharnée contre les microbes dans la lignée de Pasteur, parfois au péril de leur vie.

Il a choisit comme héros Alexandre Yersin, sous couvert duquel le lecteur découvre la vie de Louis Pasteur et l’ensemble de la première équipe de l’Institut Pasteur. Intéressant d'un point de historique.

Mais je me suis ennuyée à la lecture de ce livre. L'existence de Yersin aurait pu happer mon attention tant la routine n'avait pas sa place dans la vie de ce franco-suisse. Or, ce ne fut pas le cas.

 Franco-suisse, Alexandre Yersin est né à Aubonne (canton de Vaud) le 22 septembre 1863 et meurt à Nhan Trang (Indochine française) le 28 février 1943

 « Ses débuts en médecine se font à Lausanne. Par la suite, il ira à Marbourg, en Allemagne, à Paris (Hôtel Dieu). C’est là qu’il fera les rencontres décisives de sa vie (particulièrement Emile Roux qui l’introduira au sein de l’Institut Pasteur). En 1886, il découvre la toxine diphtérique et enchaîne sur des études en bactériologie à Berlin. En 1889, il devient le premier préparateur du cours de microbiologie de l’institut Pasteur. Et c’est à la même époque qu’il obtient la nationalité française ».

 « Tour à tour, scientifique, explorateur, anthropologue, éleveur de bétail, c’est l’Asie (Indochine), qui sera sa terre d’inspiration et malgré ses allers-retours entre l’ancien et le nouveau monde, c’est là-bas qu’il vivra le plus clair de son temps. Il y sera un élément de poids pour la recherche scientifique française.

L’histoire retiendra qu’il aura importé l’hévéa en Indochine, et l’y aura acclimaté, devenant ainsi le fournisseur de Michelin en latex. Mais ce qui sera davantage retenu, c’est sa découverte du bacille de la peste en 1894 et l’élaboration de son premier sérum antipesteux (Chine). Il sera le premier médecin à guérir de la peste  en Chine. Ce qui lui vaut une renommée instantanée. »

 Ce personnage passionnant, touche-à-tout de génie, se découvre à travers les lettres qu'il a envoyé à sa mère puis à sa sœur, ainsi qu'à ses collègues scientifiques avec lesquels il entretenait une correspondance abondante. L'auteur a égelment pouisé dans les archives de l'institut Pasteur.

 Ennuyeux car : le sentiment d'une énumération sans fin des activités et des nouveaux projets auxquels s'adonnent le héros. Là il travaille chez Pasteur, ici il embarque comme médecin de bord sur un paquebot. Le voici explorateur, puis éleveur de bétail, il fabrique du caoutchouc avec les arbres pour des pneus....

 Esprit curieux, intéressé par tout, avide de connaissance. OK. Mais qui était-il sur le plan humain ? Qui a t-il aimé, détesté ? De quoi se nourrissait sa vie intérieure ? On ne sait pas. Un grand vide parcourt ce livre où l'on parle d'une solitude heureuse et assumée...

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27 mars 2013

La Souris bleue

La Souris bleue, de Kate Atkinson,

aux Editions de Fallois, 2004

 

L’histoire : plusieurs histoires en une. La famille Land, quatre sœurs (Sylvia, Julia, Amélia et Olivia). La plus jeune disparaît une chaude nuit d’été alors qu’elle dormait dans le jardin sous la tente avec Amélia.

2e histoire : Théo, avocat, deux filles dont Laura, sa préférée. Il voulait la protéger, toujours soucieux de sa sécurité. Elle s’était dégotée un job d’été dans un bar. Il lui propose de venir travailler à son cabinet. Elle est assassinée par un homme qui fait irruption dans le cabinet « un gilet de golf jaune » sur le dos.

3e histoire : Michelle, enceinte trop jeune (une fille), mariée trop jeune. Un jour elle pète les plombs et tue son mari avec une hache (en réalité, c’est pas elle la coupable mais sa sœur). Une fois sortie de prison, elle se reconstruit sous l’identité de Caroline. Qu’est devenue sa fille ?

Le lien entre tous ces meurtres, Jackson Brodie. Détective privé à Cambridge, ancien policier. A lui de résoudre les mystères.

 

Compliqué pour le lecteur au départ de s’y retrouver. Les histoires se succèdent à un rythme trépidant. Déroutant. On s’attache à des personnages et on passe à une intrigue complètement différente. Déboussolant.

Puis, petit à petit, on apprivoise tous ses personnages qui se lient les uns aux autres. On se dit qu’un lien va apparaître entre les meurtres mais non, ce lien se tisse autour des personnages vivants qui ont recours à Jackson.

 

Avec les sœurs Land, on suit une famille pour le moins déstructurée. Un père pédophile qui abuse de son aînée Sylvia. La mère s’intéresse peu à ses filles. Mariée trop jeune à 18 ans avec un mathématicien de 35 ans. Cas à part : Olivia, que la mère adore. Une petite fille décrite comme quasiment parfaite, belle, obéissante, etc.

On apprendra à la fin du roman que Sylvia est responsable de la mort accidentelle de sa sœur. Sylvia qui s’est retranchée du monde en devenant religieuse.

Les deux sœurs Amélia et Julia voulaient savoir. Deux personnages très différents : l’une introverti, genre vieille fille, prof ; l’autre extraverti, comédienne ratée.

 

Avec Théo, on suit là encore un parent qui marque une préférence pour l’un de ses enfants : sa benjamine, Laura. Obèse, l’ancien avocat était associé dans un cabinet avant le décès de sa fille. Il ne parvient pas à faire son deuil, cherchant sans relâche le meurtrier de son enfant. Jusqu’à la rencontre avec la fille aux cheveux aux jaunes… Peu à peu, Théo avance sur le chemin de la cicatrisation.

Finalement l’homme au pull jaune était un voisin d’un prof de Laura qui s’était entichée d’elle et s’était persuadé qu’elle l’aimait et que son père était contre leur idylle.

 

Michelle, c’est une autre histoire que ne résoudra pas Jackson car il se dessaisira de l’affaire. La fille aux cheveux jaunes, est l’enfant de Michelle, celle qui aidera à Théo à remonter la pente.

 

 

Thèmes :

Les relations complexes entre parents et enfants. L’instinct maternel n’existe pas pour Rosemary Land. Théo connaît à l’inverse une relation fusionnelle avec Laura. Il voulait la protéger, mais on ne peut mettre son enfant dans une bulle. Michelle a bien du mal à intégrer son rôle de mère et de femme au foyer et elle s’impose d’être une sorte de modèle, devenant maniaque. Le père Land, quant à lui, est pédophile et ne prête guère d’attention à ses filles hormis l’aînée.

Relations loin d’être idéalisées.

 

J’ai aimé la façon dont les personnages se télescopent, se rencontrent et finissent par s’apprivoiser et faire partie de l’univers des uns et des autres.

J’ai été déboussolé par la structure de l’ouvrage, divisé en plusieurs intrigues qui au départ n’avaient aucun lien entre elles.

 

L’auteur : Kate Atkinson, née à York en 1951, installée en Ecosse, à Edimbourg.

Inspirée par Lewis Carroll, aime la « fantasy ».

Canalise son imagination part l’écriture.

Du polar, de l’humour, des crimes entrecroisés, des intrigues riches, etc.

 

27 mars 2013

L'élégance du hérisson, un plaisir

L’élégance du hérisson, par Muriel Barbery, éditions Gallimard, 2007.

 

Il y a de belles pensées dans le roman de Muriel Barbery. Le deuxième ouvrage d’une jeune femme publiée aux éditions Gallimard. Mais le premier que je découvre. Et j’avoue avoir apprécié cet ouvrage. Malgré les longues digressions philosophiques qui parfois m’ont barbée. Des parenthèses qui avaient le don de couper le lecteur de l’intrigue et de l’évolution des relations entre les personnages. Le monologue, ça va bien un temps. Mais quand il s’agit de donner une définition à l’Art ou de livrer une critique des films de machin chose, franchement je m’ennuie.

 

Non, le don de Muriel Barbery, c’est sa capacité à créer des personnages qui de prime abord n’ont rien en commun mais qui finissent par se trouver. Une concierge, une gamine surdouée des beaux quartiers, un Japonais très riche.

Trois personnes nés dans des milieux sociaux différents, élevés dans des cultures différentes mais trois personnes qui ont la même soif de culture.

Sans oublier Manuela, la femme de ménage, la meilleure amie et la seule de la concierge Renée Michel. La mère Michel qui a un chat prénommé Léon, hommage à Tolstoï. La littérature russe est aux anges dans ce livre…

Ce que j’ai aimé : la rencontre entre ces quatre personnages. Grâce à l’irruption au 7 rue de Grenelle de M. Ozu (dite Ozou). C’est lui finalement le personnage fédérateur. Lui qui va permettre à la concierge et à la petite surdouée de sortir de leur isolement en acceptant de considérer l’autre comme un ami potentiel et non un ennemi en puissance dont il faut se protéger.

Un livre sur la rencontre. La rencontre de l’autre et la capacité de soi à s’ouvrir à l’autre en laissant tomber les barrières.

 

Renée Michel est une veuve de 54 ans, qui a renoncé à l’autre depuis fort longtemps. Même quand elle était mariée, on a l’impression qu’elle était déjà seule. Traumatisée par la mort de sa sœur, elle a une façon de diaboliser la caste des riches, en considérant que pour sa survie, chacun doit rester à sa place.

Elle, issue d’un milieu populaire, famille de paysans, se doit donc d’incarner le stéréotype de la concierge. Pas question de laisser transparaître sa soif de culture, sa passion pour la filmographie japonaise, sa connaissance de Kant ou de la littérature russe. Non, elle s’est forgée l’image stéréotypée de la concierge bas de gamme, bien dans ses charentaises et qui passe ses journées à vivre par procuration à travers la lucarne du petit écran. Comment pour se protéger on en vient à se couper des autres… Car son cercle d’amis est plus que restreint : une amie, une seule. Manuela.

Et comment les gens se trouvent aveuglés par l’idée qu’ils se font des autres. C’est là où le livre de Muriel Barbery est un magnifique opus sur la rencontre : pour rencontrer l’autre, il ne suffit pas de lui adresser la parole. Il faut avoir l’envie véritable de l’appréhender, de savoir qui il est. Quand c’est tellement plus facile d’engoncer les autres dans des étiquettes. Femme de ménage ? Une pauvre vieille sans intérêt tout juste bonne à sortir les poubelles.

 

« C’est la première fois que je rencontre quelqu’un qui cherche les gens et voit au-delà », dit Paloma. Au-delà des apparences. Au-delà de l’image que l’autre cultive pour se protéger. Au-delà du carcan dans lequel nous enfermons l’autre quand nous posons sur lui le regard du conformisme et du préjugé.

 

« Nous ne voyons jamais au-delà de nos certitudes, et plus grave encore, nous avons renoncé à la rencontre ». « Si nous prenions conscience du fait que nous ne regardons jamais que nous-mêmes en l’autre, nous deviendrions fous ».

« Moi, je supplie le sort de m’accorder la chance de voir au delà de moi-même et de rencontrer quelqu’un ». Paloma encore.

 

C’est l’intrusion de M. Ozu dans la vie de l’ado qui a déclenché cette prise de conscience. Un homme étonnant de clairvoyance et d’ouverture d’esprit.

Etonnant : voir que Renée, elle qui trompait son monde depuis si longtemps avant l’arrivée de M. Ozu, s’est laissée à son tour trompée par la jeune Paloma. Uniquement parce qu’elle avait jugée l’enfant par rapport à sa snobinarde de grande sœur…

 

Vraiment un beau livre de ce point de vue là. Renée commence à s’extraire de sa coquille. Comment retourner dans le monde des vivants quand on a vécu caché au fond de sa loge depuis vingt ans (voire plus)…

 

Mais la fin… Je ne comprends pas la fin. Je redoutais une fin à la guimauve, une histoire d’amour à l’eau de rose japonaise entre Ozu et Renée. Ouf, l’auteur nous l’a évité. Mais de là à tuer Renée. Pourquoi ? Je ne comprends pas. C’est trop facile ça comme fin. On lance une histoire, les personnages grandissent, se révèlent, on s’attache, on les suit. Et boum, l’héroïne meurt écrasée par une camionnette. D’accord, Paloma en tire une leçon et renonce à se suicider pour traquer « le toujours dans le jamais ». Les instants de beauté. Mais franchement !

 

Un livre sur la rencontre, les autres, soi même, et toutes les barrières mentales, sociales, etc, que l’on met en place entre soi et les autres. Le rapport de classes bien mis en avant. Comment sortir de son milieu social pour en intégrant un autre. D’où l’incompréhension de la fin. Renée a l’impression de commettre une sorte de blasphème en copinant avec des gens riches qui ne sont pas de son milieu. Rester à sa place. « La mort est-elle sa punition ? », se demande-t-elle un instant…

 

Les personnages :

Renée Michel, veuve, 54 ans, concierge dans un immeuble bourgeois à Paris : dépense beaucoup d’énergie à se faire passer pour ce qu’elle n’est pas.

Manuela, femme de ménage portugaise, aristocrate, meilleure amie de Renée : généreuse.

Kakuro Ozu, riche japonais qui vient de s’installer au 4e étage de l’immeuble : claivoyant.

Paloma : ado de 12 ans, très intelligente, rejette son milieu familial et social. A décidé de se suicider. Lucide, mais voit tout en noir.

Et les autres : les résidents de l’immeuble. Que des riches…

 

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